En dehors du visa d’entrée qui avait malencontreusement doublé quelques semaines auparavant (40 JD/ personne), nous avons payé à la Jordanie un lourd tribut : un objectif photo à l’agonie mais qui a eu le bon goût d’attendre l’avant-dernier jour du séjour pour décéder de l’autofocus, le fond de mon dernier pantalon propre déchiqueté sur les rochers de Wadi Rum avec, pour la postérité, des spectateurs de l’exposition subséquente de mes avantages (ou inconvénients) postérieurs et des courbatures dans les jambes comme rarement nous en avions eu… A part ça, la Jordanie c’était fantastique… Je vous explique ?
Jour 1 : Jerash- Madaba
7h30, nous atterrissons à Amman. Il fait frais, ça nous change et je me dis qu’un seul pull pour la semaine risque d’être un peu juste. Au volant de notre bolide loué, nous commençons notre visite de la Jordanie par la ville romaine antique de Jerash, à 1h environ au nord d’Amman. Surprenamment, le site est très animé car envahi par des jeunes garçons en sortie scolaire comme, dans mon jeune temps, nous allions en bus visiter St Romain en Gal ou Vaison la Romaine. En essayant d’échapper aux demandes de photos des ados jordaniens qui nous abandonnent finalement le terrain après 300m de marche, nous faisons le plein de colonnes, de feuilles d’acanthe, de forums, de théâtre et autres nymphaeum. Après 2h de marche au soleil car l’ombre est chiche sur le site, nous mettons le cap sur Madaba et dans la voiture, c’est le calme plat, le réveil matinal à 4h30 du matin a laissé des traces ! Dans la lumière dorée du couchant, nous découvrons l’église Saint-George, fameuse pour sa carte de mosaïque. Les enfants traînent la patte et nous regagnons enfin l’hôtel (Mariam Hotel) où la piscine nous fait de l’oeil mais, perfidement, elle se révélera glacée !
Jour 2 : Mont Nebo – Mer Morte – King’s Highway (Dana)
Aller en Jordanie sans aller goûter la Mer Morte, ce serait comme aller à Paris sans voir la Tour Eiffel donc cap à l’Ouest pour rallier la Mer Morte avec un petit arrêt au Mont Nebo (petit conseil gain de temps/argent : au lieu d’aller au site touristique payant, nous avons fait 200m de plus et avons grimpé la petite colline pour apercevoir la même vue !). C’est notre première vision de la Mer Morte. Les rivages ne sont pas vraiment accessibles et, la plage publique ne nous ayant pas tenté, nous rejoignons ensuite l’hotel Holiday Inn pour profiter, grâce à un day-pass (40 JD/adulte dont 15JD de crédit restaurant, tarifs à vérifier) de sa “plage” et de son accès aux eaux hypersalées de la Mer Morte. Nous y arrivons sceptiques car le cadre n’est vraiment pas terrible, l’accès tout petit et les bulldozers font du bruit quelques centaines de mètres plus loin… Mais, dès l’arrivée dans l’eau, la flottaison est incroyable et, malgré l’aspect touristique de l’opération, c’est une expérience qu’il ne fallait absolument pas rater ! Nous flottons dans une solution épaisse, visqueuse et transparente dans laquelle il est impossible de couler, nous prenons des fous-rires à essayer de nager sur le ventre et nous imaginons que, quelque part, l’apesanteur doit ressembler à ça ! Un masque intégral de boue plus tard et quelques ploufs dans la piscine de l’hôtel, nous repartons vers les montagnes et la King’s Highway. Au passage, nous apprécions les panoramas sur la Mer Morte, un miroir absolu du ciel aux eaux complètement lisses comme une immense flaque d’huile bleutée. La King’s Highway traverse, du nord au sud, le centre du pays et offre de magnifiques panoramas montagneux notamment aux passage des grands wadis comme le Wadi Mujib. C’est un peu long mais le spectacle en vaut la peine. Nous rejoignons notre camp (Al Nawatef Camp) à Dana alors que le soleil se couche. Oubliée la chaleur du matin, nous sommes haut dans la montagne et renonçons vite à la douche (froide) pour nous emballer dans nos pulls et nos pantalons… Brrr, vivement demain matin.
Jour 3 : Dana – Chateau de Shobak – Little Petra
Au matin, nous découvrons que notre camp se trouve sur les hauteurs d’une jolie vallée et avec beaucoup d’à-propos, je braille chante ♪Dans la vallée de Dana, dans la vallée ♫ (OK, seuls les plus de 30 ans connaissent). Les enfants préfèrent que j’arrête et Dana se trouvant dans une belle réserve naturelle, nous en profitons pour faire une petite promenade dans les montagnes à proximité du camp qui offre, pour les plus courageux, la possibilité, grâce à des guides, de faire des randonnées plus longues. Outre des paysages magnifiques, nous rencontrons pour le plus grand plaisir des enfants (et du mien) des troupeaux de chèvres, de moutons et de chameaux qui profitent de l’herbe encore verte des versants.
Après cette bouffée de nature, nous partons à l’assaut du château de Shobak, perché au sommet de sa colline, sentinelle un peu écroulée veillant sur un pays minéral. Nous sommes quasi-seuls et notre KingBoy se prend pour le roi Arthur. Après un pique-nique dans un champ d’oliviers, nous partons vers Wadi Musa, la porte d’entrée de Pétra mais avant cela nous faisons un petit détour par Little Pétra. Son Siq et ses vestiges, moins prestigieux que sa grande soeur Pétra, n’en sont pas moins charmants et, avant l’effervescence prévisible de Pétra, le calme et la tranquillité des lieux sont une parfaite mise en bouche pour nos prochaines aventures archéologiques. Nous prenons enfin nos quartiers pour 3 nuits au Amra Palace Hotel.
Jour 4 : Petra
Enfin, fini de rigoler, nous voilà partis pour Petra et, après de rudes négociations, je parviens à convaincre la famille qu’il faut y être dès 7h00 du matin. Ça ronchonne mais, a posteriori, on me remerciera d’avoir évité au moins partiellement la foule et d’avoir bénéficié de quelques moments de fraîcheur. Assez stratégiquement, je n’ai pas trop ébruité le fait qu’au programme de la journée, il y aurait de la marche, de la marche et surtout aussi beaucoup de marches d’escalier ! Mais avant cela, comme Indiana Jones dans la Dernière Croisade (oui, je suis un être cultivé), nous découvrons d’abord le Siq, cette gorge étroite, puis le Trésor (ou Khazneh) entre deux parois de roches vertigineuses. Sa réputation d’être l’une des Merveilles du Monde Moderne n’est pas usurpée et ce n’est que le début de notre émerveillement. Petra existe depuis le 6e s. av JC et les Nabatéens, une civilisation de marchands nomades aujourd’hui disparue, ont creusé dans la roche des bâtiments époustouflants pour certains, gigantesques pour beaucoup et encore préservés aujourd’hui. Nous découvrons, le long de la route principale, les premières tombes qui constituent l’essentiel des monuments présents sur le site et la roche rose de Petra aux drapés de couleurs incroyables. Attention, ne nous méprenons pas, ces tombes ne sont pas de simples caveaux et, creusées à même la roche, certaines ressemblent extérieurement à de vrais palais si leur objectif était d’accueillir des personnalités.
Nous laissons de côté les tombes royales, faisons un tour au Grand Temple dans la rue des Colonnades avant de nous attaquer à un must-see : l’incontournable montée au Monastère (Ad-Deir) – compter environ 1h30-2h AR. Pour préserver le King Boy et pour son plus grand plaisir, nous prenons un taxi bédouin, c’est-à-dire un âne pour la montée et, au bout du chemin, c’est la récompense : le Monastère nous attend. Il est, selon moi, encore plus beau que le Khazneh auquel il ressemble beaucoup. Plus grand, plus majestueux, il se fait désirer davantage et il n’en est que plus beau. Après un pique-nique mérité à côté de la Lion Tomb, nous remotivons les troupes pour une 2e randonnée, à contre-courant, entre Qsar El Bint et le Haut Lieu du Sacrifice – compter 2h30 environ. Nous serpentons dans un petit wadi envahi de lauriers-roses en fleur, derrière chaque virage ou volée de marches, un nouveau monument, tombe, triclinium ou autre réservoir nous attend, nous surprend et nous pousse à continuer malgré les jérémiades de la DramaTeen en pleine représentation en mode » Mais pourquoaaaaaa on marche ? ». Nous parvenons enfin au Haut Lieu du Sacrifice, encore quelques mètres et au bout du promontoire la vue d’aigle sur le site de Petra, les tombes royales et le théâtre vaut bien les efforts de la marche. Nous redescendons vers la foule qui s’agglutine dans la rue principale et ne regrettons pas d’avoir fait la promenade dans ce sens car l’escalier est absolument terrible ! Khallas, la journée est finie pour nous, nous laissons les chameaux, les ânes et les touristes massés devant le Khazneh. Le retour est laborieux, les mollets fatigués et la piscine de l’hôtel grandement appréciée !
Jour 5 : Petra
Pour cette deuxième journée, dans la relative fraîcheur et surtout l’ombre du matin, nous attaquons le Al Khubtah Trail et ses nombreuses marches (600 !) – compter 2h30 environ AR. Ça monte dur, ça râle, nos jambes se rappellent à notre bon souvenir et un chat affamé auquel j’offre le corned-beef de mon sandwich fera une heureuse diversion au moral des enfants abattus par les marches qui n’en finissent pas. Une fois encore, nous sommes récompensés de notre persévérance par une vue imprenable et vertigineuse sur le Khazneh que nous dominons. Nous sommes privilégiés, loin de la foule massée au pied du monument. Après notre éprouvante journée de la veille, nous avons moins d’ambitions pédestres et nous éloignons un peu des sentiers battus en nous dirigeant vers le Wadi Mataha dont la première tombe, celle de Sextius Florentinius, est une petite merveille ! Des habitations creusées dans la roche, des tombes plus sommaires, l’endroit est moins show-off que le reste du site mais tellement charmant. Abandonnant cette tranquillité, nous consacrons la fin de l’après-midi à explorer la zone des tombes royales, opportunément rassemblées dans la même aire géographique. Epuisé par sa journée, ce sera cette fois-ci un cheval qui ramènera le KingBoy jusqu’à l’entrée du site. C’était notre dernière journée à Petra et nous en gardons un souvenir magique. Comme ce fut le cas pour le site d’Angkor, je suis abasourdie, touchée à l’extrême, par la beauté et la technique de ces bâtiments que des hommes ont fait naître voilà des milliers d’années. Peu importe la chaleur, peu importe la foule, peu importe les âniers un peu collants, peu importe les touristes qui se prennent inlassablement en photo, quelle chance j’ai eu de voir cela !
Petra : pass 2 jours : 55 JD (gratuit pour les enfants en dessous de 15 ans). Le site est très étendu et il vaut mieux avoir de bonnes chaussures pour y marcher, sans oublier chapeau, lunettes de soleil et eau évidemment. On y trouve des restaurants sur place mais les prix sont à la hauteur de la renommée du site ! Carte et infos sur le site www.visitpetra.jo
Jour 6 : Wadi Rum
Nous quittons les pierres pour le sable et les rochers du Wadi Rum. Nous rencontrons notre guide Abdullah, un Bédouin du désert, un personnage attachant et souriant. Dans sa jeep brinquebalante, nous explorons le désert qui a vu les aventures du fameux Lawrence d’Arabie pendant la Révolte Arabe. A l’ombre d’une falaise, Abdullah nous prépare un repas dont nous nous régalons et nous nous souviendrons longtemps du poulet d’Abdullah, cuit à l’étouffée dans un feu de bois que les enfants ont pris plaisir à ramasser avec lui. Des inscriptions datant de 2500 ans nous montrent des caravanes de chameau et des oryx tracés pour indiquer la route aux marchands. Nous circulons tranquillement entre les montagnes de grès posées sur un sable parsemé de petits buissons et croisons des troupeaux de chèvres et de chameaux. De temps à autre, une dune rouge surgit. Le Mâle, toujours intrépide, grimpe, sous mon regard un peu crispé, sur le Rakhabat Al Wadat, une « petite » arche de pierre au pied de laquelle je laisse d’ailleurs (cf supra) le fond de mon pantalon. Enfin, le Barrah Canyon avec ses grandes parois dorées nous ouvre la route vers le camp dont nous découvrons le confort rudimentaire. En attendant le coucher du soleil et Abdullah parti chercher un repas pantagruélique, nous regardons passer les caravanes de chameau qui rentrent se coucher. Ce ne sont plus les sacs d’épices des Nabatéens mais désormais les touristes à la recherche de sensations qui permettent à leurs propriétaires de gagner leur vie. Evolution inéluctable, le désert perd un peu de son authenticité avec les adaptations faites pour les visiteurs comme nous mais qu’importe, les paysages sont si beaux.
Jour 7 : Wadi Rum
Au matin, après un petit-déjeuner à base de thé (of course) d’houmous, de pain arabe et de falafels, nous repartons explorer , toujours en jeep et avec Abdullah, les confins du Wadi Rum qui est limitrophe de l’Arabie Saoudite. Nous vivons au rythme bédouin avec l’arrêt déjeuner à l’ombre des falaises, le feu à préparer pour le thé et le repas de midi. Nous découvrons, d’en bas car la randonnée est trop difficile, le Burdah Bridge, l’un des plus fameux du site. Le soleil baisse sur l’horizon , il est temps de regagner le camp pour notre dernière nuit.
Jour 8 : Retour sur Dubaï
Après un au revoir à Addullah, nous regagnons l’aéroport d’Amman via la Désert Highway (so boring) pour notre vol qui, après plus d’une heure de retard, nous ramènera dans les sables et les buildings dubaiotes.
La Jordanie c’était vraiment bien !
Bravo pour ce bel article chère Sylvie! J’ai voyagé a travers tes lignes et j’ai qu’une envie d’aller visiter ce lieux magique. D’ailleurs, il est sur notre liste de « must see » depuis bien des années. Mais, en te lisant, je me dis qu’il faudrait se dépêcher un peu car l’effort physique pour voir ces sites semble être considérable et nous ne rajeunissons pas… Merci pour cette évasion dans le passé !
Oui c’est certain, cela demande un peu d’effort surtout si l’on veut sortir de la « main road » et en voir un peu plus. Il y a des carrioles pour faire certaines parties moins intéressantes (notamment le chemin entre l’entrée et le Siq)… Pour notre part, le rythme (2 jours sur le site) était assez soutenu surtout avec des enfants mais avec 3 jours sur le site, je pense que c’est plus « supportable » ! Biz à toi Karin !
Enfin….
😀
Beau rappel …
Merci
J’avais la pression de ceux qui y étaient allés avant ;-).
Ca fait envie ! J’avais déjà envie d’y aller avant, maintenant je suis convaincue ! Entre le Wadi rum, Petra et la mer Morte, que de belles choses .
C’est effectivement un très beau voyage et une plongée dans l’histoire !