Chameau, la F1 du désert

Certes le faucon est l’animal emblématique des Emirats mais il en est un autre nettement plus imposant : j’ai nommé le chameau. Oui, je sais, je sais, les puristes diront qu’un chameau et un dromadaire sont séparés par une bosse, voire même par un océan. En effet, le chameau (Camelus Bactrianus) vit en Asie et a 2 bosses alors que le dromadaire (Camelus dromedarius) vit en Afrique et n’a qu’une bosse… Mais, mais, mais, le dromadaire peut aussi se faire appeler, pour tromper l’ennemi, chameau d’Arabie ! CQFD, j’ai raison, mes bêtes à bosse seront donc des chameaux et je copierai en cela la simplification de la langue anglaise qui de 2 animaux n’a fait qu’une seule appellation « camel ».

Et les chameaux ici, ils ne se la coulent pas douce sur les dunes, ils ont du taf’, ils font des courses ! Ethymologiquement « dromadaire » vient du grec « dromas » qui signifie « qui court » et c’est peu de dire que l’animal est véloce car il peut faire des pointes à 65 km/h avec une moyenne de 40 km/h.  Il est vrai que l’on ne peut qualifier la foulée de vraiment altière mais la bestiole est efficace et les courses de chameaux sont très populaires dans la Péninsule Arabique. Je ne pouvais pas rater ça !

14h30 : depuis le matin, j’argumente pour convaincre le Mâle de l’intérêt de la chose et  de mon absolu besoin de m’imprégner de la culture locale. Le Mâle rechigne, blatère même des mauvaises excuses (mettre les rideaux bla bla bla, installer les tringles à rideaux bla bla bla, tailler le bougainvillée bla bla bla…) mais je ne me laisse pas leurrer par ce sens du devoir qui peut rapidement se transformer en sieste sur le canapé. Je menace de représailles culinaires et ménagères. Le Mâle cède.

14h33 : traînant Mâle et mouflets réticents, nous prenons la route en direction de Al Ain. Le sable gagne du terrain au fur et à mesure que nous avançons vers l’est.

15h10 : hiiiiiii, des chameaux sur le bord de la route. Ils annoncent la proximité du camel track dont les différentes pistes forment des ovales pourvus d’une extrémité pointue. Amis profs de maths, cette figure a certainement un nom mais en tout cas cela ressemble à la coquille d’une moule.

15h13 : hiiiii, des chameaux, les enfants ! Vous avez vu les chameaux ?

15h20 : nous nous garons derrière la tribune du camelodrome, encore une appellation d’origine non contrôlée mais à hippodrome doit bien correspondre son camelodrome.

15h21 : hiiiiii, des chameaux, plein de chameaux dans le paddock. Les enfants, vous avez vu les chameaux ?

15h22 : Maman, arrête ! Oui, il y a des chameaux, oui on les a vus. Trop la honte…

15h25 : nous nous retrouvons dans les tribunes, on nous offre (gratuitement) des rafraîchissements en attendant l’arrivée de la prochaine course que l’on voit au loin signalée par un nuage de poussière. Un speaker s’époumone en donnant les numéros des chameaux pendant que les spectateurs peuvent suivre le show sur un écran de télé.

15h28 : les chameaux arrivent devant nous sur la piste de sable, suivis par les véhicules de leurs propriétaires. Ça court à grandes enjambées dégingandées, la bave aux lèvres, pas vraiment ce qu’on pourrait appeler de fiers destriers.

15h28 bis : hiiii, les chameaux, vous avez vu les chameaux les enfants ?!!!!

15h29 : Maman, arrêêêêtte !!!

15h30 : la course suivante démarre. Comme sur la précédente, les chameaux ne portent pas de cavaliers sur leurs dos mais de petits dispositifs robotisés. En effet, par le passé, les jockeys étaient des enfants mais cette pratique est aujourd’hui, heureusement, illégale dans les UAE. Expliquant cela à mes pré-ado et ado, j’en profite pour leur rappeler que mettre et débarrasser la table ne peut être considéré comme un travail abusif et une maltraitance à enfant. Pour une fois ils sont tous les deux d’accord et émettent de concert un soupir d’agacement.

15h35 : la course se termine.  Nous traversons la piste pour nous approcher de la zone de départ… Pas trop près quand même car les animaux ne sont pas toujours hyper sympathiques et ont de bien grandes dents pas lavées…

15h36 : hiiiii, des chameaux… Les enfants, vous avez vu- ?

15h36 : OUI !!!!

15h40 : nous nous approchons des chameaux qui sont bloqués derrière une large grille qui se lève au moment du départ. Juste à côté d’eux, les voitures se préparent elles aussi à suivre les bestiaux. Les robots sont en fait très simples : un moteur permet de mouvoir une cravache et un transmetteur (comme un talkie-walkie)  permet de commander l’animal par la voix d’où le ballet des 4×4 blancs au bord de la piste.

15h45 : les teens abandonnent la partie et vont s’avachir sur la pelouse fraîche, à l’ombre de la tribune.

15h50 : nous allons voir l’aire d’arrivée. Là les chameaux (hiiiiiii, des chameaux) se remettent de leur course, les soigneurs s’affairent autour d’eux, enlèvent les robots, rangent le matériel etc. Certains des chameaux sont entravés atendant leur tour d’être amenés vers leur écurie (camellurie ?). L’obstination de ces animaux semblant être à la hauteur de leurs performances de vitesse, les soigneurs bataillent pour bouger les chameaux dans la direction souhaitée.

15h55 : nous allons faire un tour vers le paddock (hiiiii, des chameaux). Là une touriste italienne enlace de façon torride un chameau pour la photo souvenir prise par son compagnon. Je n’ose imaginer son parfum dans les minutes qui ont suivi car le chameau n’est pas hyper soigné de sa personne et, comme tout ruminant qui se respecte, a la fâcheuse tendance de produire de nombreux gaz.

16h00 : les teens râlent, réclament de rentrer, ils en ont ras la bosse des chameaux.

16h05 : nous quittons le parking alors que le soleil commence à se faire plus doux.

16h10 : je pile au bord de la piste. Hiiiiii, des chameaux… Soupir résigné des enfants affligés par l’hystérie animalière de leur mère…

16h15 : la caravane passe, une file indienne de chameaux habillés des mêmes couleurs traverse nonchalamment la piste. Au bout de la 3e écurie (camellurie ?), le Mâle m’informe que lui aussi en a plein la bosse et que l’heure du retour a sonné. Je consens, je redémarre.

16h20 : Hiiii des chameaux sur le bord de la bretelle d’accès à l’autoroute. Les enfants ne relèvent même pas… Dans le ciel, le disque rouge du soleil commence à faire briller la skyline de Dubai, Burj Khalifa semble nous attendre, nous retournons au présent.

PS : la saison vient de recommencer. N’hésitez pas à y aller pour découvrir un pan de la culture locale. Les courses ont lieu au Al Marmoum Camel Track. Les dates et les horaires sont sur Dubai Calendar.

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